Baiser de paix

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Van Jaersvelt, Renier (orfèvre), Baiser de paix, 1546-1547, Innsbruck[AT], Hofkirche, © IRPA, Bruxelles, cliché N009243
Saint Martin de Tours partageant son manteau avec un pauvre, Baiser de paix, ivoire, première moitié du 16e siècle, Deux Acren, Eglise Saint-Martin, © IRPA, Bruxelles, cliché M094793
Phylacterium de Sainte-Barbe, argent, 1669-1670, Cathédrale d'Anvers, © IRPA, Bruxelles, cliché KM010020
Miracle de Notre-Dame de Meetkerke : La Vierge guérit une femme boîteuse, huile sur toile, 1647, Meetkerke, Kerk O.L.Vrouw, © IRPA, Bruxelles, cliché B145299, détail

Étymologie

< latin pax (paix)

Définition

Egalement appelé osculatoire (du latin osculum : le baiser), le baiser de paix est une plaque rectangulaire ou ronde en bois, ivoire, cristal ou métal précieux, comportant en général une base rectiligne ou des pieds et ornée d’une scène de la passion du Christ à l’avers et muni d’une poignée au revers. Les fidèles et le célébrant l'embrassent en signe de paix au cours de la liturgie.

Hiérarchie

Origines et développements

L’origine de l’osculatoire est intimement liée au rite que l’on nomme le « baiser de paix » [osculum pacis], attesté depuis le 5e siècle. Lors de la messe, après la consécration du prêtre, les fidèles étaient parfois invités à s’embrasser. Cette étreinte se fera de plus en plus rare au cours du temps et le geste tombera en désuétude au milieu du 13e siècle. C’est à cette même période, à la fin du siècle, qu’une plaque illustrée viendra se substituer au contact physique entre les laïcs (objet IRPA 49941). Généralement réalisé en bois, en ivoire ou en métal, le baiser de paix est présenté par le diacre ou le sous-diacre, afin que les fidèles embrassent l’image qui se trouve sur sa face. Il s’agit le plus souvent de la représentation de la Croix ou d’un calvaire. On retrouve également d’autres épisodes de la vie du Christ, une Vierge à l’Enfant ou, dans quelques cas, le saint patron d’une église (voir notamment l'objet IRPA 131396 ou le cliché M094793 ci-contre). Cette coutume se développe essentiellement au XVe siècle.

La pratique perdure mais elle semble perdre de son engouement au début du XXe siècle. Depuis lors, ce rite ne se fera qu’à de rares occasions, notamment lors des enterrements.

Certains osculatoires ont pu servir de phylacterium, c’est-à-dire de reliquaire. Les baisers de paix-reliquaires ont une fonction identique à l’osculatoire. Toutefois, l’illustration centrale est remplacée par une custode transparente contenant une relique. Il est malaisé de situer l’origine du baiser de paix reliquaire, mais selon Marek Derwich, certaines reliques ont pu être utilisées de la sorte dès le XVe siècle (voir l'objet IRPA 88184 ou le cliché KM010020 ci-contre).


Typologie

Au cours du temps, le baiser de paix a pris des formes et des dimensions variables. L’osculatoire présente le plus souvent un travail de sculpture ou d’orfèvrerie. Dans certains cas, l’image centrale peut être une représentation graphique, notamment en émaux. De manière générale, ces objets sont constitués de riches matériaux.

Les plus anciens exemples, aux alentours du XIIIe et du XVe siècle, présentent une forme rectangulaire. Certaines plaques ont un sommet formé d’un arc de cercle ou d’un gable gothique (objet IRPA 10039170). Durant cette période, une série d’exemples sont réalisés en ivoire.

L’objet reprend régulièrement des formes issues de l’architecture (objet IRPA 10058012). C’est ainsi qu’au XVIe siècle, l’osculatoire se dote d’un fronton ainsi que de colonnes antiquisantes qui encadrent l’image, tout en gardant sa forme allongée (voir objet IRPA 11052578 ou la paix d'Averbode, objet IRPA 40000601).

Depuis le XVIIe siècle, le baiser de paix est généralement réalisé en métal repoussé. L’encadrement de l’image centrale devient de plus en plus riche et varié, tout en gardant une forme relativement quadrangulaire (voir objet IRPA 9763).

Il est à noter que l’osculatoire se distingue du baiser de paix-reliquaire par son allure. Ce dernier a généralement une forme plutôt circulaire ou ovale, avec en son centre une relique exposée (voir objet IRPA 44099). Pour maintenir l’objet droit, l’anse située à l’arrière sera parfois remplacée par un trépied. Il existe également une typologie intermédiaire, où le baiser de paix garde sa forme allongée avec une représentation sacrée mais qui est également dotée d’une custode en verre, renfermant les restes d’un saint. (voir objets IRPA 154361 et 70308).

Textes normatifs

Synode de Prague de 1355. Une des premières mentions d'un baiser de paix.

"Monemus quoque omnes Plebes, Plebanos & Rectores Ecclesiarum, ut plebes suas informent, & inducant, ut osculum pacis post Agnus Dei per Clericum ipsis porrectum solum propter XI dierum indulgentias per nos dudum datas, & concessas mutuo inter se recipiant, alter alteri porrigendo, & si eos ad hoc inducere non possent, indulgemus, ut tabula cum Crucifixo in signum pacis ad osculandum deferatur."

Le Caeremoniale Episcoporum (p. 99-100) précise qu'en présence de laïcs, le signe de paix leur est donné à travers un "instrument" qui aura été embrassé par le prêtre assistant :

"Regulare est, ut pax detur primo cuiuscumque ordinis, videlicet, primo ex Canonicis Diaconis, &primo ex Canonicis Subdiaconis, ubi distinctae sunt praebendae; vel, ubi praebendae non sunt distinctae, primo ab utroque latere stanti, qui successive pacem dat alteri subsequenti, &ille dat alteri: &, si aderunt laici, ut Magistratus, & Barones, ac nobiles, detur pax cum instrumento, quodinstrumentum osculetur prius Presbyter assistens"

Les instructions pour la construction des églises (Livre II) de Charles Borromée prévoient des baisers de paix plus précieux que d'autres. Ils sont ornés d'une image pieuse. L'anse est du même métal que le reste de l'objet.

"De tabella gestatoria pacis

Tabella gestatoria pacis, quae pretiosior est, ex auro, vel argento ; minus pretiosa, ex aurichalco conflata, aliquoque piae caelaturae ornatu insignis, imaginem pietatis condecenter egregieque expressam exhibeat: latitudine constet unciarum octo, longitudine duodecim circiter; a tergo manubrium habeat ejusdem metalli."

Le baiser de paix est encore mentionné dans le Ritus servandus ou Ordo missæ de 1965 (X - L’oraison dominicale et la suite jusqu’à la Communion) : Alors, les mains jointes posées sur l’autel, incliné, il dit à voix basse : Domine Iesu Christe, etc. Cette oraison terminée, s’il doit donner la paix, il baise l’autel et l’instrument de paix qui lui est présenté par le ministre agenouillé près de lui à droite, et il dit : Pax tecum.

Autres dénominations

osculatoire

Autres langues
NL pax
EN pax (liturgical object)
DE Kusstafel
IT pace (liturgia)
ES portapaz
Langues anciennes
Latin pax, osculatorium, instrumentum pacis
Ancien français paix, portepaix

BALaT

Les baisers de paix (1400-1700) dans BALaT - Photothèque

Représentations de baisers de paix (1400-1700) dans BALaT - Photothèque

Les baisers de paix dans BALaT - Bibliothèque

Fichiers liés

Baiser de paix, fiche du thésaurus : Dernière modification le 28-11-2017

Bibliographie

  • Magie de l’orfèvrerie, Argenterie européenne de 1500 à 1850 dans les collections privées, Bruxelles, 2000, p. 74 et 112.
  • Bernard Berthod & Élisabeth Hardouin-Fugier, Dictionnaire des arts liturgiques, XIXe-XXe siècle, Paris, 1996, p. 101-103.
  • Marek Derwich, « Le baiser de paix utilisé lors du couronnement des rois de Pologne et déposé au Trésor de Notre-Dame de Paris. Considérations sur l'importance des croix et des reliques pour le couronnement des rois de Pologne », in Cahiers de civilisation médiévale, n°152, Octobre-décembre 1995, p. 337-344. https://doi.org/10.3406/ccmed.1995.2628
  • Piero Donati & Maria Ludovica Nicolai, « Problemi di ricostruzione in una piccola oreficeria: la pace di Portovenere », in Kermes : la rivista del restauro, v. 16, n° 52, 2003, p. 32-36.
  • L. Guénebault, « Notice sur l’instrument nommé oscultarium, osculum pacis ou vulgairement paix », in Revue Archéologique, 15e Année, n° 2, 1858/1859, p. 421-423. https://www.jstor.org/stable/41742573
  • Joël Perrin & Sandra Vasco Rocca, Thesaurus des objets religieux, Paris, 1999, p. 219-221.
  • Sacraal metaal. Liturgische gebruiksvoorwerpen : betekenis, funktie, evolutie, vorm, cat. exp. Sint-Truiden, Museum voor religieuze kunst, 2 vol., 1984, p. 7-8.
  • Frans Van Molle, « De pax van Averbode in de Hofkirche te Innsbrück en het borstkruis van abt Mattheus’s Volders », in Revue belge d'Archéologie et d'Histoire de l'Art - Belgische tijdscrhift voor Oudeheidkunde en Kunstgeschiedenis, 41; Louvain, 1974, pp. 3 à 20.
  • Mieke van Zanten, Religieus erfgoed uit kerken en kloosters in de Lage Landen, Zutphen, 2008, p. 200.

Webographie


Oeuvres sous la loupe

Osculatoires en ivoire